Toute l’eau de l’incendie, 25.
Le 16 juin, deux mois après l’incendie, une messe est célébrée dans la cathédrale, dans une chapelle épargnée par les flammes. L’archevêque, en place de sa mitre, a coiffé un casque de chantier. Le parvis sera bientôt rouvert à la circulation. La cathédrale est sous bâche, ses plaies cachées derrière une palissade lisse, ses nervures rompues invisibles aux regards. Dans quelle mesure l’urgence de la réparer a-t-elle été dictée par la gêne de notre société devant les images de la mort ordinaire, des blessures de la vie, des infirmités des corps ? Amoindrie, la cathédrale de la capitale ferait-elle perdre de sa dignité au pays ? Les femmes qui ont subi une ablation du sein racontent comment les chirurgiens proposent « naturellement » une prothèse, sans interroger le rapport singulier de chacune à son être et à ses cicatrices, et comment ils s’étonnent, parfois se scandalisent, quand elles préfèrent ne pas recouvrir la trace de ce qui a été enlevé.
Les films d’épouvante abondent, tout remplis d’une horreur dont je n’ai jamais compris l’intérêt, ni le plaisir qu’on peut en tirer. Le sensationnel du martyre, de la découverte de corps suppliciés, fait la une des journaux tant qu’un autre événement ne lui vole pas la vedette. Seuls quelques militants constants continueront de dénoncer l’ordinaire de la torture dans les prisons de maints pays, jour après jour, sans détourner les yeux au prétexte que « c’est comme ça ». Pour le reste, il faut des gens beaux et des monuments entiers.
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