Hier c’est déjà loin.
L’ordinaire des jours a repris le dessus. Pour me souvenir de Naples, je dois gratter la surface du quotidien. La mémoire est une affaire de fouille et d’enfouissement, de creusement, de sédimentation, de recouvrement.
Je ne sais rien des modalités physiologiques d’encodage des informations par le cerveau ; ce phénomène me fascine, la mystérieuse façon dont se constitue la mémoire, et comment ses éléments affleurent à l’esprit, recomposant un passé qui change avec le temps. Car le passé n’est pas immuable, chaque jour nouveau le transforme en fonction du présent. Les instants se déposent les uns sur les autres et agissent entre eux pour former la vie. Le futur se transforme sans relâche en passé, mais le futur est multiple dans ses potentialités ; ne faut-il pas en distinguer ce qui à l’instant présent est futur et qui ne sera pas accompli ? Ce qui deviendra donc une branche morte du temps.
Quelquefois des années séparent un fait de sa restitution par le cerveau, et nous ne cessons de mélanger les temps. Quand un souvenir fait retour dans l’esprit, il reste encore un secret à percer : celui qui les transforme en récit.
Photos Anne-Marie Passaret
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