Une autre fois, de Piero Cohen -Hadria

Une autre fois

ce n’est pas compliqué : c’est comme à Venise, sempre dritto
une longue avenue

au vrai, ça commence par une rue, celle de Rome (et j’aime cette rue, son nom parce que j’aime cette capitale-là, et aussi pour celle de Gênes, pour celle de Paris)

et puis ça devient, après une place, cette avenue, on prend sur la gauche, la petite rue qui monte, là les restes et la colonne vue dans le film

https://www.lairnu.net/ville-et-cinema/2023/12/19/marseille

on redescend, on continue, c’est le matin, aller vers l’est est facile : il faut sentir l’astre de face 

on aime marcher

on pense que c’est vers l’est, mais en fait, c’est le sud

une espèce de sud

il y a un demi-siècle, je descendais dans un hôtel dans une petite rue qui, elle, descendait de la gare, je me souviens de cette ville mais je n’avais jamais été si loin

on marche encore longuement – on passera devant le stade (les stades, outre que j’agonis le sport, pour moi, garderont toujours l’odeur de celui de Santiago à la fin de l’été soixante-treize – sans même parler des vélodromes)

l’avenue en boulevard s’est transformée

on marche et il fait doux, c’est la lumière, la vraie lumière de cette ville-là pareille à nulle autre, la lumière, c’était en décembre

on marche droit, longuement

et puis on arrive à cette barre – pointée parallèlement au rivage – on monte on s’arrête au troisième – et là, il n’y a plus tant de commerces

une illusion, une utopie peut-être

l’immeuble reste là, têtu comme une bourrique

beau comme un livre

un parallélépipède droit rectangle et parfait

un peu comme l’objet livre

on monte encore

on découvre la mer on découvre le lieu, il fait beau – elles ne sont pas d’Épinal, ces images, elles sont là, et nous sous le charme

il y a peu l’espace de la terrasse a été transformé en théâtre mercantile des filles y marchaient vêtues de tissus de prix, sans couleurs et sans forme – elles marchaient pour faire vendre

ce monde est absurde, et s’empare de tout, de n’importe quoi, pour le dégrader – indigne – laisse

on était sur ces hauteurs à admirer et le blanc et le vert et le jaune des cérames – un homme passait, s’installait au loin

on entendait et on sentait l’iode marin – repartis par le même chemin, on a tourné à gauche

sur le boulevard – Barral je crois, on s’est perdus dans les collines 

et on s’est retrouvés à rejoindre la corniche, en bas dans une boulangerie, un pain aux olives et une part de pizza

et on s’est installés, là

Un texte de PIERO COHEN-HADRIA

https://www.pendantleweekend.net

2 réponses à “Une autre fois, de Piero Cohen -Hadria”

  1. Avatar de brigitte celerier
    brigitte celerier

    et bien c’est beau comme la ville
    pas certaine tout de même que les filles qui marchaient pour faire vendre des vêtements chers et forcément sans formes ni couleurs aient été si déplacées dans ce que devient la ville (bon elle résister, en a vu d’autres)
    et oui elle est belle

  2. Avatar de Pierre Cohen Hadria
    Pierre Cohen Hadria

    merci à toi pour l’accueil, Laure – et à vous Brigitte

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